Le Grand Classement des Vins de Bordeaux millésime 2008

I did a version of this article in English, you can read it at this address / J’ai fait une version de cet article en anglais, vous pourrez la lire à cette adresse :

https://alexissabourin.wordpress.com/2012/12/03/the-great-ranking-of-bordeaux-wines-vintage-2008/


Nous en avons eu connaissance en primeur et avions déjà annoncé les changements introduits dans cette nouvelle édition :

https://alexissabourin.wordpress.com/2012/11/24/sortie-du-classement-poussart-2008-le-3-decembre/

Comme un signe de la mondialisation à laquelle pas même le vin n’échappe, le guide de Rémy Poussart a été traduit en anglais. La couverture donne un aperçu, avec deux titres : un en français, et un en anglais. On ne s’en plaindra pas, c’est l’occasion pour les anglophiles d’assimiler un peu de vocabulaire du vin dans la langue de Shakespeare.

11 appellations différentes sont représentées aux 11 premières places. Un fait étonnant car malgré l’existence dans le Bordelais de plusieurs dizaines d’AOC (57 précisément), on aurait pu s’attendre à ce que les plus prestigieuses trustent les premières places. Avec un panel de près de 600 vins censés être les principaux du vignoble, les propriétés les plus célèbres sont présentes. Vous me pardonnerez si j’ai eu la flemme de vérifier si tous les crus classés y figuraient, mais les principaux y sont.

La Presse du vin qui met habituellement ces grands vins sur un piédestal et se garde bien de les confronter à des vins moins réputés, a peu ou prou relayé la sortie de cet ouvrage pour le millésime 2007. Et on imagine qu’elle en parlera peu également pour cette édition 2008. C’est dommage.

Un petit mot sur le Château Crusquet Sabourin s’impose. Avec la note de 12,5 il est considéré comme un très bon rapport qualité-prix mais occupe une place forcément décevante comparé à celle qu’il avait obtenue l’an dernier pour le 2007 avec un joli 14,4. Ceci est d’autant plus surprenant que le 2008 a plus d’atouts pour plaire que son prédécesseur et que cette tendance est confirmée par la clientèle que j’ai pu rencontrer : plus rond et puissant, avec des arômes de fruits mûrs. A mon avis,deux éléments peuvent expliquer ce classement, ce qui est l’occasion de revenir sur les critiques adressées au Guide Poussart.

Le premier élément, c’est la finale assez boisée et astringente du Crusquet 2008. Il semble que  les dégustateurs font la chasse à certains caractères, les arômes boisés et verts en tête de liste. On leur donne raison à 100% mais pas à 200% car certains vins assez denses et agréables se font dépasser par des vins plus légers, mais plus fruités.

Le second élément explique ce constat : les vins ne sont pas dégustés par appellation, où dresser une hiérarchie est plus facile, mais mélangés. Si on déguste un vin de Blaye à 10€ après un grand cru dix fois plus cher, la logique veut que la comparaison soit flatteuse pour l’un, et pas du tout pour l’autre. Or l’objet de ce classement Poussart est de démontrer que ce n’est pas systématiquement le vin le plus cher le meilleur, ni le moins cher le moins bon. Au-delà des questions de goût, on l’observe parfois en pratique. Ce constat va dans le bon sens car cela pousse chacun à viser l’excellence.

Certains lots sont donc certainement moins favorables, pour n’importe quel vin : il est probable que les grands crus les moins bien notés dans le guide aient eu à subir la comparaison essentiellement avec d’autres grands crus. Il serait donc intéressant d’avoir la composition des séries dégustées sur le site Internet du GJIV(*) dont un certain nombre de commentaires précédant la parution de ce guide sont déjà présents :

Nous continuerons à suivre son évolution car ces dégustations à l’aveugle sans préjugé lié à l’appellation ou au prix des vins sont le meilleur moyen d’en obtenir une bonne évaluation.

Pour le Château Crusquet Sabourin, gageons qu’il obtiendra une meilleure place dans les éditions suivantes. Avec les millésimes 2009 et 2010, ce dernier gratifié notamment d’une médaille de bronze aux Decanter World Wine Awards, avec une belle concentration, des arômes de fruits noirs dominés par la mûre, des tanins fondus… personnellement je suis confiant et impatient, mais il faudra attendre l’année prochaine.

En attendant, comme annoncé dans l’article précédent, voici le top 50 des vins les mieux notés dans Le Grand Classement des Vins de Bordeaux millésime 2008 :

Nom (cuvée), AOC, note sur 20, note sur 100(**), production (en bouteilles), prix (en euros) :

1. Château Gaby (cuvée Gaby), FRONSAC, 17.8, 95, 4.500bts, 30€
2. Château Martet (Réserve de Famille), SAINTE-FOY BORDEAUX, 17.7, 94,44.400bts, 35€
3. Château Pape-Clément, PESSAC-LEOGNAN, 17.5, 94,120.000bts, 85€
4. Château de Chantegrive, GRAVES, 17.4, 94, 180.000bts, 16€
5. Château Lafite Rothschild, PAUILLAC, 17.3, 93, 200.000, 880€
6. Château La Gasparde (Cuvée Prestige), COTES DE CASTILLON, 17.3, 93, 19.800bts, 15€
7. Prémya, PUISSEGUIN-SAINT-EMILION, 17, 93, 3.500bts, 16€
8. Château Léoville Poyferré, SAINT-JULIEN, 17, 93, >200.000bts, 59€
9. Château Beau-Séjour Bécot, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.9, 92, 60.000bts, 39€
10. Château Plince, POMEROL, 16.9, 92, 50.000bts, 23€
11. Château de Barbe Blanche, LUSSAC-SAINT-EMILION, 16.9, 92, 80.000bts, 15€
12. Virginie de Valandraud, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.9, 92, 15.000bts, 37€
13. Château Larmande, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.8, 92, 80.000bts, 30€
14. Château SANSONNET, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.8, 92, 16.000bts, 18€
15. Château HAUT-VIGNEAU, BLAYE, 16.8, 92, 12.000bts, 11€
16. Château Nénin, POMEROL, 16.8, 92, 50.000bts, 33€
17. 1938, PUISSEGUIN-SAINT-EMILION, 16.7, 92, 3.500bts, 12€
18. Petrus, POMEROL, 16.7, 92, 54.000bts, 2.300€
19. Château Pichon-Longueville Baron, PAUILLAC, 16.7, 92, 288.000bts, 95€
20. La Tour du Pin, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.7, 92, 28.000bts, 33€
21. Château Saint-Georges (Côte Pavie), SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.7, 92, 21.000bts, 28€
22. Château L’Archange, SAINT-EMILION, 16.7, 92, 3.800bts, 20€
23. Château de Fieuzal, PESSAC-LEOGNAN, 16.7, 92, 110.000bts, 30€
24. 1938, LUSSAC-SAINT-EMILION, 16.7, 92, 3.500bts, 12€
25. Château Les Grandes Murailles, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.6, 92, 10.000bts, 30€
26. Château Léoville Barton, SAINT-JULIEN, 16.6, 92, 215.700bts, 65€
27. Château Faugères, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.6, 92, 55.000bts, 29€
28. Le Clos du Beau-Père, POMEROL, 16.6, 91, 7.000bts, 35€
29. Domaine de L’A, CASTILLON-COTES DE BORDEAUX, 16.6, 91, 40.000bts, 27€
30. Miss Petit Mangot, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.6, 91, 3.700bts, 15€
31. Prémya, LUSSAC-SAINT-EMILION, 16.5, 91, 3.500bts, 16€
32. Grand Vin de Reignac, BORDEAUX SUPERIEUR, 16.5, 91, env.200.000bts, 22€
33. Château Méjean, GRAVES, 16.5, 91, 33.000bts, 18€
34. Château Léoville Las Cases, SAINT-JULIEN, 16.4, 91, 180.000bts, 135€
35. Vieux Château Palon, MONTAGNE-SAINT-EMILION, 16.4, 91, 30.600bts, 18€
36. La Dame de Onze Heures, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.4, 91, 4.800bts, 45€
37. Château Troplong Mondot, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.4, 91, 70.000bts, 100€
38. Château Rol Valentin, SAINT-EMILION GRAND CRU, 16.3, 91, 27.000bts, 35€
39. Château de Malleret (cuvée M), MARGAUX, 16.3, 91, 5.000bts, 23€
40. Château Seguin, PESSAC-LEOGNAN, 16.3, 91, 90.000bts, 19€
45. Château Bel-Air La Royère, BLAYE, 16.3, 91, 12.000, 19€
46. Château La Croix-Toulifaut, POMEROL, 16.3, 91, 10.000bts, 33€
47. Château Calon Ségur, SAINT-ESTEPHE, 16.3, 91, 100.000bts, 65€
48. Vieux Château Gaubert, GRAVES, 16.3, 91, 45.000bts, 15€
49. Château d’Issan, MARGAUX, 16.3, 91, 91.000bts, 40€
50. Château Belle-Vue, HAUT-MEDOC, 16.3, 91, 60.000bts, 17€

Cette liste était un peu ambitieuse mais donne une bonne vue d’ensemble. Le millésime 2008 semble faire la part belle aux vins du Libournais et de la rive droite. On peut féliciter la cave coopérative de Puisseguin-Lussac de placer 4 vins dans ce classement (« 1938 » et « Prémya » étant des cuvées de luxe déclinées dans chacune des deux AOC de la cave). A titre personnel je dirais bravo aux Château Haut-Vigneau et Château Bel-Air La Royère de représenter Blaye parmi les 50 meilleurs de ce classement des vins de Bordeaux !

Une dernière remarque : je ne l’ai pas rapportée plus ici parce que jusqu’à 40€ ces vins ont tous bénéficié de la note maximale pour le rapport qualité-prix, symbolisée par 3 petits cœurs, synonymes d’un excellent rapport qualité-prix. Au-delà de 40€, en revanche, les petits cœurs disparaissent très vite. Certains considèrent en effet qu’aucun vin ne devrait valoir plus de 50€. Après, c’est du domaine de la spéculation.


(*) Le site du Grand Jury International des Vins : http://www.gjiv.com/

(**) La note sur 20 et la note sur 100 rapportées ici ne sont pas liées, la 1e tenant compte de la méthode de notation classique, la 2nde tenant compte de la méthode de notation anglo-saxone telle qu’utilisée par Robert Parker.
La méthode française consiste à délivrer une note sur 50 puis à la doubler pour avoir celle sur 100 (qu’on a donc divisé par 5 pour avoir celle sur 20).
La méthode anglo-saxone consiste également à donner une note sur 50, mais à lui ajouter 50 points supplémentaires.

4 réflexions au sujet de « Le Grand Classement des Vins de Bordeaux millésime 2008 »

    1. Bonjour Julien, c’est par ici :

      http://www.ranking-bordeaux.com/RANKING-BORDEAUX-7/index.html

      Vous constaterez que le Classement des vins de Bordeaux pour le millésime 2012 sort le mois prochain. Par conséquent, le Classement 2015 sortira sûrement en… 2019 !

      Pour l’instant, ce millésime commence à peine à être commercialisé et les plus grands vins sont encore en cours d’élevage. Vous trouverez des notations sur le 2015 suites aux dégustations de ce millésime en primeur : les vins du dernier millésime sont encore en cours d’élevage et malgré cela les journalistes aiment pouvoir les évaluer.

      Les dégustations organisées par Rémy Poussart sont différentes car les vins du Classement Poussart sont déjà disponibles à la vente. Un grand vin se juge notamment par son évolution dans le temps et leur jeunesse désavantage certainement les favoris et explique les résultats surprenants. Mais cela renseigne aussi sur les attentes des consommateurs qui veulent des vins prêts à boire. On en revient toujours au même : trop de bois tue le bois !

      Et puis, alors que certains se reposent sur leurs acquis, d’autres se remettent en question et font des progrès. Pour moi il n’y a pas un seul classement valable, chacun livre un enseignement. Celui-ci en livre plusieurs.

      Une dernière chose : il serait intéressant de faire un classement cumulé tenant compte des différentes éditions. Celui-ci serait sûrement le plus fiable concernant le niveau réel d’un vin. Si le potentiel de garde d’un vin est un critère déterminant de sa qualité, la régularité en est un autre.

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